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Le hussard vert
16 mai 2010

Argent trop cher ?

"On me doit un chèque. Un producteur de cinéma me doit un chèque. Comment va-t-il s'y prendre pour ne pas me le donner ? Comme de nombreux confrères, j'ai connu les diverses péripéties de cette histoire. Et les choses n'ayant guère changé, je la raconte aujourd'hui, comme si j'étais un jeune scénariste qui s'aventure en terre inconnue. Dans le pays des cent mille embûches, où les ruses de l'argent sont imprévisibles (et quelquefois très profondément mystérieuses), il court après un chèque papillon, un chèque sauterelle. Il s'énerve, il s'épuise, il s'exaspère, mais sans jamais perdre toute espérance. J'ai choisi le parti d'en rire. Même si ce rire est forcément amer et désabusé. Mais au moins il est une ligne de défense, une bouée dans la détresse. Personne ne m'en privera. Et puis, au détour d'une feinte, d'une colère, d'un égarement ou d'une vraie crise, il m'arrive, à cette occasion, de parler un peu de cinéma." J-C. C. 

carri_re  "Est-ce que mon chèque serait par là ?"                                          

Levons le suspens, Mon chèque est un livre plus crispant que drôle. Le lire n'apporte rien si ce n'est deux heures de lecture.  Le personnage du scénariste est trop mou et peu crédible, sa femme trop patiente ; toutes les scènes commencent de la même manière sur les mêmes formules de politesse, le procédé lasse vite. Je m'en veux d'être si dur car j'apprécie beaucoup cet auteur.

En fait tous les personnages sont caricaturaux : un scénariste candide, un producteur qui l'est beaucoup moins, une assistante autant hypocondriaque qu'alcoolique, des comptables fatigués. On a l'impression que Carrière a construit son roman à seule fin de distiller ses anecdotes (et il y en a de très bonnes). Il expédie ses personnages en deux lignes, ses décors en une.
Il faut reconnaître que les scènes sont bien construites, les dialogues sont vivants et rebondissent vite. Toutefois on peut déplorer un manque d'ambition narrative qui aurait permis au livre d'être plus qu'un divertissement. Jean-Claude Carrière ne joue que sur le comique de situation, de plus son histoire reste trop à la surface, elle aurait mérité un traitement plus burlesque ou plus intellectuel, partir dans l'absurde Kafkaïen ou bien dans les coulisses du cinéma. Au moins on aurait rit ou appris quelque chose. (Le thème du cinéma n'est effleuré qu'entre la page 116 et 120).

Avec Vous plaisantez monsieur Tanner, Jean-Paul Dubois en client arnaqué lors de la rénovation de sa maison par toute la corporation des artisans, s'en sortait beaucoup mieux. L'histoire ne tournait pas en rond, de catastrophe en catastrophe, et d'avenant en rallonge, elle avançait. Et si les personnages frôlaient souvent le cliché, ils avaient assez d'originalité pour exister et surtout pour qu'on s'y intéresse. L'auteur avait choisi de forcer un peu le trait, à raison car je me souviens avoir beaucoup ri. C'est peut-être ce qui manque à Mon chèque : de la folie et de l'originalité.

Au final, Mon chèque ne dépasse pas ce qu'il dénonce : une histoire formatée pour le grand public, consensuelle et démagogique, d'ailleurs c'est plus un scénario qu'un roman. Il semble écrit pour être "prêt à filmer" : décor contemporain, peu de personnages, des rebondissements, et en toile de fond, la crise boursière... Bref, il est facilement adaptable pour un budget raisonnable. Et s'il ne fait pas un bon film, il fera un bon téléfilm ! Dans le rôle principal : Dany boon ou Gad Elmaleh ?

On préfèrera du même auteur La controverse de Valladolid (Pocket) ou son Dictionnaire amoureux du Mexique (Plon).

mon_ch_que Mon chèque, Jean-Claude Carrière (Plon)

Dubois_vous_plaisantez_monsieur_tanner Vous plaisantez monsieur Tanner, Jean-Paul Dubois (Points)

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Le hussard vert
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