Afrique

Ebène, Ryszard Kapuscinski (Pocket)

Quatrième de couverture :"Un grand reporter doublé d'un véritable écrivain livre ici le fruit de plus de quarante ans de fréquentation assidue de l'Afrique. Depuis son premier séjour à Accra, la capitale du Ghana, en 1958 où il arrive en tant que représentant de l'Agence de presse polonaise, Ryszard Kapuscinski n'a cessé de sillonner le continent en évitant les itinéraires officiels, préférant partager la vie des nomades du désert ou des paysans de la savane. Ses reportages offrent à la fois une vision lucide et passionnante de l'Afrique contemporaine et une série de portraits attachants qui se lisent comme autant de brefs romans. La finesse de l'analyse jointe à l'intelligence du cœur font de ce livre une des meilleures introductions à un continent tourmenté par des malheurs incessants, mais cependant plein de promesses."

Il fallait un polonais pour nous raconter ces histoires africaines ; les français, les anglais, les italiens, les portugais et même les américains ou les russes ne peuvent jamais masquer leur culpabilité d'anciennes puissances coloniales. Quelques soient les enjeux, leur propos débouchent toujours sur un mea culpa ou une tentative de justification de leurs passés. La Pologne est étrangère à ces questions, elle regarde l'Afrique droit dans les yeux, sans complaisance.

R. Kapuscinski (1932-2007) 

L'auteur a silloné de nombreux pays, sa connaissance est intime. On voit, on sent et on sue. Chaque chapitre se lit comme un roman en puissance. On passe d'un trajet en 4x4 dans la savane à une crise de paludisme, de l'avénement d'un dictateur à l'arrivée d'un éléphant au milieu d'un mariage ; c'est riche, exubérant et  lucide. Kapunscinski allie les qualités du grand reporter et la passion du voyageur, l'intuition de l'ethnologue et la simplicité de l'homme pour nous donner un portrait vivant et dépouillé du continent africain.

L'Afrique est un thème qui effraie, ce livre est complet, accessible et d'une grande perspicacité. Le magazine Lire l'avait élu meilleur livre de l'année 2000. Grace au talent narratif de l'auteur, j'ai compris en quelques pages le génocide rwandais, les mécanismes de la dictature d'Amin Dada, ceux d'un coup d'état à Zanzibar ou des famines successives en Ethiopie. On comprend la grande Histoire et on s'attache aux petites. On est séduit par les silhouettes des chauffeurs et des cuisinières, on s'émerveille des paysages désertiques et des forêts tropicales : on sourit, on s'offusque, on vit l'Afrique, par procuration.

Avant Ebène, j'avais lu Allah n'est pas obligé de Kourouma. J'avais beaucoup moins aimé, notamment à cause des précisions récurentes de vocabulaire qui tue la magie du récit. Ces définitions tous les dix lignes ont pollué ma lecture jusqu'à annihiler mon désir de poursuivre : j'ai laissé le héros quelque part près de Monrovia - j'espère qu'il va bien. Cette semaine je lis deux livres Les trésors de la mer rouge de Gary et La porte des larmes de Guillebaud/Depardond. En voyageur immobile, je voulais prolonger mon séjour en Abyssinie. Je les chroniquerai bientôt.

Comments

[Eeguab]

Un très grand livre,l'Afrique au coeur.