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Le hussard vert
27 avril 2009

Lire Cormac McCarthy, ça fait mal !

Cormac McCarthy est un grand écrivain américain - en tout cas l’un de mes préférés. On le compare souvent à Faulkner, mais son œuvre n’a plus besoin d’être comparée. Elle est sortie depuis longtemps de l’ombre de son ainé et vit par elle-même.

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Quand on ouvre un roman de McCarthy, on s’attend à prendre des coups. Ces récits sont durs, exempts de pitié ; on encaisse sans broncher des uppercuts aux mentons. Ce sont des histoires de taiseux, sans surprise ni rebondissement.  On sait ce qui va arriver et ca fait souvent mal. Les paysages et les chevaux sont beaux, les hommes moins. McCarthy décrit des grands espaces sauvages ce qui rend encore plus petit ses personnages. Deux lignes suffisent à décrire physiquement son héros*, alors qu'il consacre deux pages à l'évocation d'une plaine, d'un arbre ou d'une masse rocheuse. Il invente une religion du paysage dans laquelle une nuit à la belle étoile sur la selle de son cheval vaut communion. Comme chez Hemmingway, les personnages n'existent que par leurs actes : pas de justification ou de réflexions intérieures. Tout est là, au dehors, âpre et sans concession. Une BO de son œuvre pourrait être l’album Carried To Dust de Calexico, un groupe Rock d’Arizona : rugueux et planant, entre blues, rock et mariachi. Une musique qui refuse de se laisser enfermer dans un genre, qui refuse les frontières…

D’ailleurs McCarthy s’impose, au fil de ses publications comme l’auteur de la Frontière : frontière Nord-Sud (De si jolis chevaux, Le Grand passage), civilisation-barbarie (Méridien du sang), homme-monstre (No country for the old man). Il m'a réconcilié avec les auteurs américains, qui racontent des histoires et inventent des mythes. Ce n’est pas prétentieux, c’est ambitieux.

J’ai lu son dernier roman en mars 2008 et si ces livres précédents distribuaient des crochets et des uppercuts au visage. (A lire vite et mâchoire serrée), La Route (édition de l’olivier) porte des coups à l’estomac, de ceux qui coupent les jambes et donnent la nausée. On vacille, la lecture ralentit, elle laisse le temps aux mots et aux images de s’imprimer. Un an après l’émotion est toujours vive : les phrases économes de mots, comme une langue asséchée, ont laissé en moi une trace profonde et grise, une souillure, un sillon, une plaie. Au-delà du style, ce livre mêle les thèmes de la paternité et la transmission ; la grisaille et le froid, la faim et la soif, et le désir de vivre quand il ne reste rien. Un livre qui explore la dernière part d’humanité avant sa disparition. La Route est le roman de la frontière ultime celle qui sépare les morts des vivants : Cormac McCarthy a créé une légende.

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La Route Cormac McCarthy (L'Olivier)

* hormis No country for the old man

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